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presse
La
Coordination permanente des médias libres [CPML]
et la Fédération nationale des vidéos de pays
et de quartiers (FNVDPQ), avec la complicité des députés
Verts à l'Assemblée nationale, ont
organisé, le lundi 31 janvier 2000,
un colloque avec pour thème :
Le tiers secteur audiovisuel : un accès citoyen à
la télévision |
Conclusion
par Noël Mamère
Mesdames,
messieurs, monsieur le président du CSA, chers amis,
C'est avec
beaucoup de plaisir qu'avec l'aide de mes collègues députés
Verts, j'ai organisé ce colloque sur le thème du tiers secteur
de l'audiovisuel. Je remercie l'ensemble des participants et
particulièrement la Coordination permanente des médias libres
et la Fédération nationale des vidéos de pays et des quartiers
avec lesquelles nous avons en quelque sorte coproduit cette
journée.
Pour les
Verts, la communication a une place essentielle. C'est elle
qui construit en quelque sorte l'imaginaire collectif de la
société. En cela la communication est une question
politique centrale de notre époque. Et la télévision
est pour le moment le vecteur privilégié de diffusion
de cet imaginaire. Tout simplement parce que 98 % des habitants
la possèdent et la regardent en moyenne 3 heures 30 par
jour. On ne peut donc se désintéresser de cette
question quand on est un responsable politique et quand, de
plus comme moi-même, on a vécu de l'intérieur
pendant plus de 15 ans l'évolution de cette étrange
lucarne. J'en ai tiré il y a quelques années un
livre "La dictature de l'audimat" où après
avoir mis en lumière les caractéristiques lourdes
dues à l'introduction de l'argent et de la publicité
dans le service public, j'insistais sur le rôle déterminant
des citoyens pour contrôler et transformer le Paysage
audiovisuel français.
Aujourd'hui,
grâce à vous nous y sommes. Les citoyens veulent
prendre leur part dans cette formidable bataille des images.
Comme avec le mouvement des radios libres c'est l'intervention
du mouvement social dans le processus de la communication qui
peut faire évoluer le PAF. Rappelons nous, il y a 20 ans,
les radios libres luttaient pour le droit à la diversité
contre le monopole d'État sur les ondes. 1981 leur donna
gain de cause et une brèche fut ouverte de manière
décisive engendrant la création d'un secteur privé.
La naissance de la Haute autorité, dont le CSA est l'héritier
et la coupure du cordon ombilical du journalisme télévisuel
avec le ministère de la Communication. Aujourd'hui c'est
à un deuxième monopole qu'il faut s'attaquer,
celui des groupes industriels et financiers comme Vivendi, la
Lyonnaise ou Bouygues qui n'ont cessé d'utiliser les
nouvelles possibilités ouvertes par la loi pour imposer
leur hégémonie sur les ondes.
Pour cela il faut réunir trois conditions :
-
Renforcer
le service public
En lui donnant les moyens de son développement et de son indépendance
tout en limitant et même en excluant la publicité pour en
finir avec la course à l'audimat. Nous avons souvent dit notre
scepticisme sur l'efficacité de la loi en discussion. Nous
le redisons ici.
-
Des
mesures anti-concentration dans le privé
La présente loi est revenue sur les engagements de
1997. Rien n'entrave la volonté de puissance de ces
groupes transnationaux qui puisent leur force dans l'attribution
des marchés publics de l'eau ou du BTP. La loi telle
qu'elle est ne change rien. C'est un encouragement à
ce que j'ai appelé la délinquance télévisuelle
de ces grandes entreprises qui tentent de contrôler
et de "marchandiser" l'ensemble de notre vie quotidienne.
Cela n'a rien à voir, je le précise pour qu'on
me comprenne bien, avec la lutte pour la libération
des ondes que les télévisions libres mènent
à travers cette désobéissance civile
qu'est le piratage.
-
L'existence
d'un tiers secteur de la communication
Ce qui existe avec les radios locales associatives doit pouvoir
être étendu à la télévision. Il n'y a aucune raison d'empêcher
l'accès des associations à l'espace hertzien. Nous avions
présenté un amendement en ce sens en première lecture. Il
avait été refusé. Le Sénat a fait passer une mesure allant
dans ce sens. Nous voulons croire que madame la Ministre dans
sa grande sagesse appuiera lors de la seconde lecture notre
amendement. Mais il faut pouvoir financer ces télés. Une liberté
sans moyens ne serait qu'un faux semblant. Il faut donc étendre
le Fonds de soutien des radios locales aux télévisions associatives
en élargissant la taxe sur les recettes publicitaires des
télévisions commerciales.
Je rappellerais
aussi l'amendement qui a été adopté à notre initiative en première
lecture sur les canaux d'accès public sur le câble. Il faut
distinguer ces canaux qui permettent l'accès de toutes les associations
et de tous les citoyens des télés associatives qui ont une production
propre. Dans
les deux cas nous sommes dans le cadre du tiers secteur. Dans
les deux cas c'est une avancée de la démocratie télévisuelle.
Mais l'accès public est un droit inaliénable qui ne peut dépendre
de la volonté d'un quelconque directeur de programme.
C'est pourquoi
nous prônons, à l'exemple des 2.000 canaux de "free-access"
aux USA ou de l'"Offener Kanal" en Allemagne, la création
de canaux de ce type. Le canal d'accès public est un
canal ouvert, libre, indépendant de tout intérêt
municipal, ou commercial, non censurable qui fonctionnera selon
le principe "premier arrivé, premier servi".
Il permet localement de former les citoyens à l'audiovisuel
et est un vecteur d'animation locale. Il pourra fonctionner
dès la promulgation de la loi, à partir d'un cahier
des charges national élaboré par le CSA, sur les
700 réseaux câblés si nous créons
ensemble un puissant mouvement de promotion de ce nouveau droit,
pour que des centaines d'associations se créent localement
et demandent au CSA que les réseaux actuels puissent
disposer d'un canal d'accès public.
Le tiers
secteur doit aussi pouvoir s'étendre à toutes les formes de
diffusion, analogique et numérique, local, régional ou national.
Concrètement l'occasion de la seconde lecture de la loi, le
numérique hertzien doit être ouvert au secteur associatif par
la réservation de canaux à cet effet et par l'obligation de
transport gratuit des chaînes associatives par les opérateurs
commerciaux. Enfin nous devons remettre sur la table l'épineux
problème de la responsabilité éditoriale déjà posé sur Internet
grâce à l'action déterminante de Valentin Lacambre et de l'amendement
Bloche. Ce problème existe pour toutes les formes d'accès public
dans lesquelles c'est le producteur d'image qui doit être responsable
et non le diffuseur.
Le tiers
secteur, mesdames, messieurs, chers amis, est une condition
de la liberté prônée par l'article 1 de
la loi sur la communication audiovisuelle. Il l'est parce que,
grâce à lui, le droit à la communication
de secteurs entiers de la population peut être assuré.
Les exclus, les immigrés, les chômeurs, les jeunes,
étudiants ou lycéens (qui ont cette possibilité
aux États-Unis), ceux qui veulent parler leurs langues
régionales, les habitants des quartiers en difficultés,
le mouvement associatif, ceux et celles qui se battent pour
l'environnement ou le droit des femmes dont on ne parle pas
dans la télévision officielle, tous ceux dont
l'identité est bafouée et qui se sentent humiliés
par la télévision commerciale ou abandonnés
par la télévision publique doivent pouvoir obtenir
le droit d'émettre au même titre que Le Parisien
Libéré ou Matra Hachette. Le véritable
pluralisme audiovisuel commence par là. Le pluralisme
audiovisuel ne réside pas dans la comptabilité
d'apothicaire pour savoir si les partis politiques ont tant
ou tant de minutes pour s'exprimer. Le pluralisme audiovisuel
est d'abord un pluralisme social. Si des fractions entières
de la population ont l'impression que leur image est déniée
quotidiennement à la télévision, qu'elles
n'ont aucun moyen dans cette société de l'information
pour communiquer leur propre vision du monde, elles se réfugient
dans une spirale du silence et laissent parler à leur
place des démagogues et des extrémistes. C'est
pourquoi le Droit à la communication est et sera un des
droits majeurs pour lequel il faut et faudra se battre sur le
terrain comme ici à l'Assemblée nationale.
Mais le
tiers secteur, c'est aussi un élément important
de la réflexion des députés écologistes
sur la société en général. Toute
une partie de la société s'organise dorénavant
à travers les réseaux de l'économie solidaire.
Le mouvement associatif, coopératif, mutualiste devient
une réalité importante de l'économie. Parce
que ces secteurs non marchands sont socialement utiles, qu'ils
répondent à des besoins identifiés qui
ne sont pas rentables selon la simple logique du marché,
ils se développent à partir de l'initiative citoyenne
et d'un fonctionnement démocratique. En ce sens, le tiers
secteur est un élément de régulation de
l'économie qu'elle soit traditionnelle ou nouvelle comme
dans le cas de l'Internet. Le tiers secteur de l'audiovisuel
doit pouvoir devenir la face visible de cette économie
sociale et solidaire. De même que la presse agricole,
syndicale, associative, paroissiale ou la presse politique d'opinion
était au XIXe et XXe siècle un élément
essentiel de l'espace public, de même la télévision
associative, et d'accès public, l'Internet non marchand,
les radios de quartiers seront au XXIe siècle des éléments
constitutifs du nouvel espace public.
Face à
la convergence des télécommunications, de l'informatique
et de la télévision qui se traduit aujourd'hui
par la création accélérée de méga-Big
Brothers tels Aol-Time Warner ou Vivendi-Canal Plus-Vodaphone
qui veulent mettre en coupe réglée le citoyen
réduit à l'état de consommateur assistée
par ordinateur, nous devons tout faire pour qu'existent d'autres
voix, d'autres médias. C'est dans ce sens que, au nom
des députés Verts, je déposerai des amendements
pour imposer dans la seconde lecture de la loi les modifications
nécessaires pour que puissent exister un secteur associatif
télévisuel, que je déposerai en lien avec
la Coordination permanente des médias libres [CPML] et
tous les acteurs concernés une proposition de loi pour
la démocratisation de la télévision et
la création d'un tiers secteur de la télévision.
Enfin après
la loi, la vie ne s'arrête pas. Pourquoi ne pas créer
avec les syndicats de journalistes, les syndicats du service
public, les médias libres et tous qui veulent y contribuer
un comité de suivi et de vigilance sur les lois concernant
l'information et la communication. Nous l'avons fait à
propos de la loi Chevènement sur l'immigration avec des
députés socialistes et communistes, les collectifs
de sans-papier et les associations antiracistes et de droits
de l'homme. Pourquoi ne pas le faire dans ce secteur si important
pour l'avenir de la société française,
alors que se préparent des changements décisifs
qu'il faudra anticiper, alors que la législation toujours
en retard d'une technologie, évolue sans participation
citoyenne. Les élus doivent pouvoir travailler avec les
acteurs concernés au-delà d'un colloque, exercer
une veille sur l'application des lois et des décrets,
faire des propositions issues du débat public.
Le tiers
secteur au-delà de l'État et des lobbies industriels
et financiers c'est aussi une autre façon de faire de
la politique. Et la communication Ťa n'est pas seulement de
la propagande, ça peut aussi servir à faire une
autre politique, celle qui permet d'améliorer la vie
quotidienne dans la cité, je vous remercie.
Noël
Mamère, député
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Soutiens
collectifs
Acrimed -
Fédérer et libérer - ReZal404 -
RHEA (Rassemblement pour une Humanité Equitable dans l'Avenir) -
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- J. Ch. Champredonde - D. Blum (médecin) -
Lex Larue (étudiant) - Claire Mellini (journaliste
et cinéaste) - Serge Michot (étudiant) -
Henri Maler (universitaire) - Pierre Botella (journaliste
indépendant) - J.M. Manach (journaliste dépendant) -
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(créateur multimédia) - Monique Richard -
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(homonyme professionnel) - Georges Arthaud (vétéran
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et internaute du dimanche) - Charlie AC!, écrivain
public, Gironde - Charles Martin, écrivain public
- Patrick de Haiku productions - J-Bernard Saxel, syndicaliste
et webmestre - Lucile Fievet, informaticienne, salariée,
étudiante et membre d'avril - Dazibao, Bruxelles - Meryem
Marzouki, Iris - Eric Wurbel, doctorant en informatique - Brann
Joly, étudiant-internaute - David Chapuis, webmestre
- Jean-Luc Castellani, webmestre - Anne C., internaute
libre - Eric Blum, étudiant et Grand Gibus - Nathan, webmestre
indigné - Eddy
Mrasilévici, internaute attentif -
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