Je voudrais d'abord remercier les organisateurs
de cette rencontre qui nous ont permis de consacrer une journée
à mieux connaître le tiers secteur audiovisuel et échanger nos
propositions pour lui reconnaître enfin sa juste place dans
notre système audiovisuel national.
Le projet de loi sur l'audiovisuel vient
d'être examiné au Sénat en première
lecture. Je me propose de vous faire un rapide compte-rendu
des principales dispositions qui ont été votées
en faveur des télévisions locales associatives,
et de relever les points qui restent en suspens et pour lesquels
il nous faudra nous mobiliser à l'Assemblée Nationale
comme au Sénat en deuxième lecture.
I - Avant toute chose je tiens à
redire les raisons pour lesquelles il me paraît essentiel
de garantir l'existence des télés locales associatives.
Alors qu'il y a aujourd'hui une abondance
de chaînes, il est important qu'il y ait des programmes nouveaux
et différents qui soient offerts aux téléspectateurs et non
une répétition de mêmes programmes.
Alors que les chaînes thématiques
de plus en plus spécialisées ont pour effet de
fragmenter les publics et cherchent chez le téléspectateur
une cible commerciale à vendre aux publicitaires et que
les grandes chaînes publiques nationales ont pour mission
de rassembler tous les Français autour de programmes
généralistes, les télévisions locales
rapprochent les citoyens en renforçant le sentiment d'appartenance
à une région, un département, une ville
ou un quartier. Elles réalisent un vrai travail de service
public et de service au public. Les télévisions
locales peuvent être un véritable instrument au
service de notre démocratie.
Ce rôle peut d'ailleurs, me semble-t-il,
être mieux rempli par des structures associatives, comme
c'est le cas pour les radios, que par des structures commerciales,
orientées vers le profit.
Le tissu associatif capable de produire
est aujourd'hui très dense. Vous l'avez largement démontré
ce matin. Le tiers secteur audiovisuel devrait avoir toute sa
place dans nos régions, nos villes, nos quartiers, plus
particulièrement à Paris, où s'aggrave
l'individualisme, la solitude, la dualité sociale.
Le rôle du législateur est
donc bien de répondre aux attentes du citoyen-téléspectateur
et de garantir le pluralisme en matière de programmes
locaux. Il se doit d'organiser les conditions juridiques et
économiques de l'existence du tiers secteur audiovisuel.
II - C'est dans ce but qu'avec le
groupe socialiste, j'ai présenté trois amendements, dont un
seul a été voté par la majorité sénatoriale.
1) L'amendement qui a été
adopté par le Sénat prévoit d'allonger
de 6 à 9 mois la durée maximale des autorisations
temporaires délivrées par le CSA, pour les services
de radio et de télévision.
Comme vous le savez, les rares
télévisions locales associatives qui ont pu émerger
en milieu urbain ou rural n'ont pu obtenir que des autorisations
provisoires, d'une durée de 3 mois maximum, renouvelables
une seule fois. A Paris, je pense par exemple à Ondes
Sans Frontières dans le XXème arrondissement qui
a obtenu deux autorisations provisoires et à Télé
bocal dans l'Est parisien qui a bénéficié
d'une autorisation pour 3 mois, qui vient de se terminer il
y a quelques jours.
Je ne m'attarderai pas trop sur cet amendement qui me semble
secondaire par rapport aux deux autres. Il constitue certainement
un progrès, plus particulièrement pour les télévisions
et radios associatives en milieu scolaire et universitaire,
où la demande est très forte. Une telle mesure
permettra ainsi de faire correspondre la durée des autorisations
au rythme annuel des étudiants.
2) Le second amendement vise à
ouvrir aux associations le réseau hertzien terrestre.
Vous le savez comme moi, dans l'état actuel de la loi, seules
les télévisions locales commerciales, organisées en société,
peuvent bénéficier d'une autorisation de diffusion, délivrée
par le CSA après appel à candidatures. Mon amendement permettait
à l'autorité de régulation de délivrer des autorisations de
diffusion à des associations sur le réseau hertzien analogique
et cela pour une durée de 5 ans.
En fait, cet amendement a été rejeté car la majorité sénatoriale
lui a préféré - oh surprise - celui du rapporteur de la Commission
des finances, le sénateur BELOT, qui autorise les associations
et les sociétés d'économie mixte à faire acte de candidature
pour les autorisations de fréquences. Pour ma part, je reste
sceptique sur les réelles motivations de la droite sénatoriale.
En effet, l'amendement BELOT mélange ainsi deux types de projets
sensiblement différents. Il y a, me semble-t-il, un risque réel
que fleurissent les " télévisions monsieur le maire ".
3) Notre troisième amendement
visait à créer un fonds de soutien aux télévisions locales associatives
conventionnées par le CSA, sur le modèle de celui qui existe
déjà pour les radios associatives depuis 10 ans. J'ai retiré
cet amendement car la Ministre, si elle est favorable au principe
d'un financement, souhaite se donner le temps de la réflexion
sur le dispositif le plus adéquat.
Pour ma part, je pense qu'il y aurait vraiment une forme d'hypocrisie
à donner le droit à l'existence au tiers secteur
audiovisuel sans lui en donner les moyens.
Les télévisions locales associatives sont par
nature non commerciales et à but non lucratif. Elles
sont structurellement déficitaires, comme toutes les
associations culturelles. Ainsi on peut imaginer que le budget
moyen d'une télévision locale associative se situe
entre 4 et 5 millions de francs, hors coût de diffusion.
Il est clair qu'elles ne pourront survivre qu'avec l'apport
d'un financement public important.
Nous devons tirer les leçons de
l'histoire des radios libres, créées par la loi
de 1982 sur la liberté de communication et qui, faute
de financements, ont pendant des années été
la proie des réseaux commerciaux. Grâce au fonds
de soutien à l'expression radiophonique, ce sont aujourd'hui
entre 400 et 500 radios associatives qui, sur l'ensemble de
notre territoire, contribuent à la vie culturelle et
à l'animation sociale, en milieu rural comme en milieu
urbain.
Sans qu'il soit pour moi question de
toucher aux financements des radios associatives, il me semble
qu'une taxe du même ordre que celle appliquée à
la publicité télévisuelle pour alimenter
le fonds de soutien radiophonique pourrait permettre d'abonder
un fonds pour les télévisions ; il suffirait de
déplafonner le montant du chiffre d'affaire sur lequel
s'applique la taxe radio.
Si, comme un certain nombre d'experts l'ont dit, ce sont près
d'1,5 milliards de francs qui, avec la baisse de la publicité
sur les chaînes publiques, seront ainsi transférés
au secteur privé, je crois que nous pouvons effectivement
en prélever entre 300 et 400 millions pour financer ces
nouveaux espaces de liberté que seraient des télévisions
locales associatives.
III - Je terminerai par un bilan rapide
de ce qu'il nous reste à faire en seconde lecture pour assurer
le développement durable du tiers secteur audiovisuel