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En face du Grand Rex où se tenait la treizième cérémonie des 7 d'or, sept journalistes et sympathisants de Télé Bocal ont été placés en garde à vue. Eclectisme d'une soirée entre grilles de télé et de cellule. Les cars de police s'alignent, côtoyant les limousines indécemment garées le long des barrières de sécurité qui encerclent le Grand Rex, où se tient la treizième cérémonie des 7 d'or. Le quartier est bouclé, façon Fort Knox. Un habitant lâche, les dents serrées : "Je pourrais passer ? J'habite ici." Le policier, pince-sans-rire, lui rétorque : "Je pourrais voir la carte d'identité qui me prouvera que vous habitez bien ici ?" Ambiance. À croire que le temps de chien a douché l'enthousiasme et la bonne humeur d'une soirée tout à la gloire du tube cathodique et de ses vedettes, smokings et robes du soir à l'avenant. Mais la cérémonie, si elle tolère à moitié les allées et venues des passants tentant, qui de voir une vedette, qui de rentrer chez lui, ne tolère pas la présence des médias libres. En début d'après-midi, vers 15 heures, un membre de Télé Bocal a été interpellé. "Ils ont porté plainte contre moi parce qu'on a dû faire sauter le cadenas d'une grille, afin d'accéder au toit d'un immeuble mitoyen du Grand Rex. On voulait y installer un émetteur qui aurait permis la diffusion de nos émissions. Mais ce cadenas, on l'a immédiatement remplacé !", se défend Michel, à peine sorti de ses cinq heures de garde à vue au commissariat du 2e arrondissement. La police a veillé à ce que "l'embastillé" se
sente un peu moins seul derrière des grilles pas très
cathodiques. Un peu plus tard devant le Grand Rex, Richard Sovied, journaliste
à Télé Bocal tente caméra à l'épaule
d'interviewer Pierre Carles, auteur sulfureux du brûlot Pas vu
pas pris mettant en lumière la connivence politico-médiatique.
"J'étais en train de répondre aux questions de Richard,
lorsqu'un CRS m'a demandé de m'identifier. J'ai refusé
de le faire comme la loi m'y autorise. Vexé, le flic a demandé
du renfort et les choses se sont envenimées", ricane Pierre Carles.
Les deux protagonistes se sont retrouvés ceinturés, puis
mis à terre et menottés. Dans la foulée, deux journalistes,
de Libération et du Parisien, qui couvraient l'événement,
ainsi que deux membres de Télé Bocal, ont été
embarqués, direction le commissariat le plus proche. Liberté
de la presse, vous dites ? Quand Richard brandit sa carte de presse,
le policier aboie vertement : " Pendant quelques heures, aucune information ne filtre du commissariat. À l'intérieur non plus d'ailleurs. "On est restés dans la cellule sans savoir pourquoi on était là. Au bout d'un moment, on nous a dit que c'était pour témoigner et vérifier nos identités", raconte Julien, qui vient juste de sortir de son interrogatoire, tout heureux de retrouver les autres membres de l'association et son matériel vidéo intact. "On a même récupéré notre banderole de contestation !" se console-t-il. Richard non plus ne repart pas les mains vides, montrant son assignation à comparaître : "Je suis convoqué au tribunal le 18 novembre à 13 h 30." Motif ? "Résistances avec violence", ironise ce journaliste avoisinant les soixante kilos tout mouillé, rigolant : "J'aurais frappé deux CRS. Le premier faisait 120 kilos, le deuxième deux têtes de plus que moi. De toute manière, les journalistes présents pourront témoigner", lâche-t-il. Ultime souvenir de leur passage, rédigé dans le carnet de suggestion du commissariat : "Laisser les journalistes interviewer Pierre Carles" ou encore "Ne pas défendre les soirées privées payées avec notre argent". Enfin libérés, tous se rassemblent autour d'un plateau de télé improvisé sur la plate-forme d'un camion de la Coordination permanente des médias libres (CPML), stationné avec autorisation en face du Grand Rex. Retour à l'envoyeur, les associations rendent une dizaine de téléviseurs à Catherine Trautmann, avec ce cri du coeur, inscrit en jaune pétant sur l'un d'eux, "fais-moi jouir". Et en filigrane, "nous réclamons l'accès aux ondes hertziennes". Sur place, Alain L'Huissier, président d'Ondes sans frontières (OSF), dénonce "la création de ce système uniquement alimenté par une télévision commerciale", ainsi qu'"un argumentaire qui prétexte l'absence de canaux libres afin d'empêcher à une télévision associative d'émettre". Rien que sur Paris, il en a déjà recensé huit de disponibles. Pierre Carles revient sur son "arrestation croquignolesque, qui prouve bien que ceux qui détiennent les rênes de la télévision aujourd'hui, commencent à flipper devant l'ampleur du mouvement lancé par les médias libres". À l'intérieur du Grand Rex, en coulisses, autre ambiance. Journalistes et microcosme audiovisuel en sont encore aux petits fours et au champagne, ne se souciant pas de ce qui se passe dehors et n'ayant d'yeux que pour le couple Lauby-Foucault qui officie sur la grande scène. Le lieu a des allures de défilé de mannequins : l'inévitable Adriana Karembeu, Linda Hardy ou encore Sandrine Dominguez rentabilisent leur forfait maquillage. Entre deux questions aussi pénétrantes que " Alors, ¨a fait quoi d'avoir un 7 d'or ? " et " Où allez-vous le mettre ? ", Jean-Pierre Pernaut, meilleur présentateur de journal télévisé (sic), intervient avec luminosité sur l'affaire. Genre : "Pierre Carles, c'est qui ça ? Pas vu, pas pris, c'est quoi ça ?" En revanche, Ruth Elkrief paraît plus au courant. Son sourire s'élargit à la seule évocation de Pierre Carles, et sa réponse fuse : "Je n'ai pas à vous répondre." Guillaume Durand, que la question interpelle franchement, nie "le danger que peuvent représenter ces télévisions libres sur les ondes". Voulait-il dire qu'il n'y a aucun danger que cela arrive un jour ? Emmanuel Chain, quant à lui, a du mal à y croire : "C'est
hallucinant ! Mais les médias libres, c'est comme les petits
producteurs face aux grandes surfaces." On est analyste économique
ou on ne l'est pas. Pour Claire Chazal, "les médias sont libres
en France. La preuve, vous pouvez m'interroger !" Elise Lucet, lucide
: "Pierre Carles a été placé en garde à
vue ? Il doit être content, alors ! Sophie Bouniot et Sébastien Homer
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