Rebond
Média et immédiat
La
proposition repose sur l'idée que l'ensemble des technologies
dont nous disposons actuellement dans le domaine de l'expression
audio-visuelle pourrait nous aider à mettre en oeuvre une
pédagogie globale de notre relation à l'environnement.
Il pourrait s'agir de rétablir notre relation au temps
- donc à l'oeuvre - et de considérer la langue comme
le matériaux qui donne sa spécificité à
nos paroles, à nos idées et à nos images.
Il s'agirait donc aussi de rétablir la pensée comme
matière première. Aujourd'hui nous vous invitons
à vous approprier les mouvements internes propre à
"La Commune" pour les prolonger à l'extérieur comme
il vous plaira. Dans le contexte géopolitique et historique
de Strasbourg, voici la proposition : "La
Commune c'est Guernica"
En
1971, - dans son article "éléments pour Guernica"
- paru dans l'ouvrage collectif "Hommage à Picasso" édité
par les cahiers d'arts, Jean-Louis Ferrier écrit : "Les
horreurs de la guerre menées avec les armes de la technique".
Cette phrase de l'historien Wilhelm Boeck résume assez
bien le sentiment du public et de la critique de l'époque
devant Guernica. Ceux qui, rompus à l'art moderne,
lisaient la toile sans difficulté comme Maurice Raynal,
y dénombrèrent des fuyards aux yeux révulsés
perdus dans une effroyable mêlée de cadavres, parlèrent
d'une vision d'apocalypse. L'attitude en général
négative de la presse suivie par certains milieux de gauche
qui jugeaient l'oeuvre "antisociale, ridicule et tout à
fait inadéquate à la saine mentalité du prolétariat"
est également significative. Ce que grands et petits bourgeois,
esthètes, militants ouvriers refusent ou acceptent au contraire
de regarder en face, à Paris, en 1937, ce n'est pas seulement
la dernière peinture de Picasso avec tout ce qu'elle contient
de scandaleux du point de vue de l'art, mais notre monde lui-même
qui bascule dans la violence, l'affrontement prochain avec le
fascisme dont la guerre d'Espagne est le prélude et que
chacun sait inévitable. (...) On saisit mal, le plus souvent,
la raison pour laquelle Guernica est noir et blanc alors que tant
de sang a été versé dans cette lutte inégale,
ou bien on trouve paradoxal que l'artiste ait peint un nocturne
à partir d'un bombardement effectué en plein jour.
(...) Ce qu'il en a vu ce sont les photos de presse, les bandes
cinématographiques, ce qu'il en a lu, noir sur blanc, les
articles des correspondants de guerre qui s'accordaient pour dire
que la lumière des bombes au phosphore enveloppaient tout
de gris. (...) La vérité est plutôt qu'il
ouvre une série nouvelle, car il est le premier tableau
de l'époque mass média. Pratiquement le seul jusqu'ici.
(...) Au niveau de l'espace d'abord, issu du Cubisme, qui retourne
la perspective euclidienne comme un gant, la déhanche,
la casse, pour marquer avec force que, dans cette affaire, c'est
l'ordre des choses que les hommes ont mis en place pièce
par pièce qui est d'un seul coup menacé dès
lors que crèvent la fine pellicule de civilités
qu'on nomme civilisation. (...) S'interrogeant sur le sens du
fascisme, Roger Caillois, conclut à un dérèglement
de la raison. (...) Et ce n'est certainement pas le hasard si
ce dérèglement est apparu dans le moment historique
qui a vu naître ensemble les vociférations de Hitler
- sans elles privées de sens - et la radio. De telle sorte
que ce qui culmine dans Guernica ce n'est, en définitive,
rien d'autre que la violence de notre inconscient collectif, c'est
à dire justement les puissances incontrôlables libérées
dans notre société par les mass média! Mais
le fascisme n'est pas seul en cause. Dans leur lâcheté,
les gouvernements occidentaux ont envoyé à Guernica
une commission d'enquête qui laissa entendre que la petite
ville avait été détruite probablement par
les basques eux-mêmes. Que c'était par conséquent
un coup monté par le communisme international pour les
entraîner dans la guerre. A cette lâcheté aussi,
Guernica répond sans esquive. Car Picasso, au lieu
de s'arrêter aux frontières d'une narration anodine
a su atteindre les régions profondes où chacun sentait
obscurément que se joue la vérité.
Questionnement
:
1871 ? 1937 ? 2000 ? La France ? L'Allemagne ?
L'Europe ? Les média ? Le cinéma ?
Les USA ? Le Nouvel Ordre Mondial ? Le fascisme
? La guerre ? Après avoir expérimenté
une première lecture globale de La Commune, après
avoir réfléchi sur les parallèles et divers
points de rencontre entre "La Commune" et "Guernica"
dans tous les sens des termes nous vous invitons,
pour ceux d'entre vous qui survivront à la Semaine Sanglante,
à discuter ensemble (après la projection ou à
l'occasion de la diffusion à Strasbourg, vendredi prochain,
du Film "La Bataille de Culloden" de Peter Watkins).
Rebond
:
Un projet de création initié par les comédiens
et techniciens pour continuer le processus d'expression de la
parole publique au-delà de l'oeuvre de La Commune.
L'idée première de ce projet est d'expérimenter
une pédagogie créative de l'histoire.
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