MEDIAS
La loi sur l'audiovisuel public à l'Assemblée
La Télévision numérique passe l'étape des députés
Malgré quelques grincements de dents dans la majorité plurielle,
l'Assemblée a adopté le projet Trautmann
Par Isabelle Roberts
Libération du samedi 25 et dimanche 26 mars 2000


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«  L'étrange lucarne
sera bientôt
une fenêtre
grande ouverte. »
Catherine Trautmann

Après trois jours d'examen à l'Assemblée nationale, après deux ans de rajouts et de corrections et avant un aller-retour entre le Sénat et l'Assemblée, qui est pleinement satisfait de la loi Trautmann ? Réponse : Catherine Trautmann elle-même. Jeudi, peu avant minuit, à l'issue de l'adoption de son projet de loi sur l'audiovisuel, elle a présenté son texte comme «une nouvelle frontière» pour la télévision, et le numérique hertzien comme «une révolution pour les téléspectateurs». «L'étrange lucarne sera bientôt une fenêtre grande ouverte», a-t-elle même espéré. Pourtant ce n'est pas le plébiscite, ni dans la majorité plurielle, ni –logiquement– dans l'opposition.

Grincement de dents. Michel Françaix (PS) s'est déclaré «plutôt fier» du projet, mais a tout de même admis qu'«il faudra y revenir car les choses bougent vite dans ce secteur». Noël Mamère (Verts), qui n'a pas obtenu entière satisfaction sur la reconnaissance du tiers secteur audiovisuel (Libération du 23 mars), regrette la «frilosité» du gouvernement mais votera la loi. A droite, Pierre-Christophe Baguet (UDF), dernier vaillant représentant de l'opposition sur les bancs de l'Assemblée jeudi soir, a stigmatisé «une lecture confuse, marquée par des négociations de couloir de dernière minute». Il a jugé qu'«au total, on aura laissé passer l'occasion d'une vraie révolution de l'information».

Malgré les grincements de dents, le texte a établi les contours de la télévision de demain: résolument numérique et terrestre. Les fréquences analogiques actuelles seront multipliées par six, ce qui permettra de recevoir environ 36 chaînes via son antenne-râteau.

Nouveaux canaux. Le service public, réuni au sein du holding France Télévision (France 2, France 3 et la Cinquième), se taille la part du lion avec l'attribution au minimum de neuf canaux, mais, soucieuse néanmoins d'attirer les chaînes commerciales vers cette nouvelle technologie, l'Assemblée a prévu un maximum de cinq canaux par chaîne privée. La loi favorisera les télévisions existantes si elles se transposent sur le numérique dans un délai de deux ans à partir de la promulgation de la loi: elles bénéficieront de la prolongation du «terme de l'autorisation prorogé dans la limite de cinq ans jusqu'à la date d'extinction de la diffusion en analogique». La nouvelle configuration laissera également de la place aux nouveaux entrants, parmi lesquels devraient figurer les groupes Pathé et Lagardère, mais aussi les télés associatives non commerciales, désormais autorisées à postuler à des attributions de fréquences hertziennes. Un rapport gouvernemental devra préalablement en définir le statut et le financement. D'ici dix ans, TF1, Canal+ et M6 auront une quinzaine de canaux, France Télévision une dizaine et autant pour les nouvelles télévisions.

La loi devrait être adoptée avant le 29 juin, date de la fin de la session parlementaire 2000. Si les rumeurs de remaniement ministériel se confirment, Catherine Trautmann ne sera peut-être plus en place pour voir sa loi devenue réalité.

Isabelle Roberts.


©Libération