Un collectif de réalisateurs : Vidéorème

Né en 1991, Vidéorème se compose d'une équipe de six réalisateurs qui s'expriment avec la vidéo pour "promouvoir le documentaire." Mais attention, à ne pas confondre avec une maison de production qui vendrait ses films à la télévision ! Le but est justement d'éviter que le documentaire soit un produit de la télévision institutionnelle. Alors, comment ? Simplement en essayant de réaliser des films qui "dépassent la simple saisie événementielle", en passant par une réflexion sur l'introduction de la caméra, et surtout en s'attachant à "restituer la parole d'hommes et de femmes qui ne l'ont que très rarement et n'existent dans les médias qu'en tant qu'objets". Cet objectif double et très ambitieux, à la fois exigence artistique et préoccupation sociale, se traduit donc par la réalisation régulière de documentaires.

Mais l'association a voulu pousser plus loin l'idée de donner aux gens la possibilité de s'exprimer. Aussi, depuis 1994, ses activités se sont-elles étendues à la mise en place d'ateliers de réalisation. Ils sont ouverts aussi bien à des adolescents (collégiens, lycéens) qu'à des adultes, soit à l'initiative du collectif, soit sur la demande d'une autre structure. Les réalisateurs de Vidéorème, qui encadrent ces ateliers, veulent que les participants puissent s'impliquer dans une démarche collective. Ils les encouragent à produire une création dont le sujet est leur quotidien, en apprenant à maîtriser le langage audiovisuel. C'est pourquoi ces ateliers permettent aux "apprentis documentaristes" de travailler concrètement à toutes les étapes : choix du sujet, tournage, montage et recherche d'une possibilité de diffusion.

Ici, la réalisation de documentaires est une façon, par le biais d'une démarche artistique, d'aborder des problèmes sociaux, d'apporter un regard sur différentes cultures, et de s'engager sur des mouvements politiques. Ces ambitions sont concrètement appliquées, par exemple dans Du beurre dans les épinards, réalisé en 1998 par Patrick Deboosère et Gilles Deroo. Au départ, les réalisateurs ont rencontré des femmes qui se réunissaient dans le cadre d'un atelier d'aide à la consommation pour essayer de gérer leur maigre budget. Le film les laisse parler, chez elles, avec leurs familles, de leurs difficultés financières. Mais à aucun moment le propos ne tombe dans le misérabilisme. On écoute, ébahi, le discours résigné ou révolté de leurs maris, chômeurs ou Smicards exploités par leur entreprise, mais toujours dignes et riches d'humour. L'un d'entre eux nous livre une parabole grinçante de notre monde, représenté par deux voitures miniatures, la plus petite celle des "plus démunis" et la plus grande celle des riches. De la poésie chez les pauvres, on croit rêver ! Citons brièvement d'autres sujets, comme ils les appellent des "pas vus à la télé" : les relations entre des jardiniers retraités, immigrés algériens et français "de souche", qui entretiennent ensemble des potagers ouvriers de Tourcoing, ou la création d'un collectif d'Agir ensemble contre le Chômage à Roubaix...

Tous les documentaires sont diffusés en avant-première dans un cinéma ou un lieu associatif de la région, avec le souci d'ouvrir le débat entre réalisateurs, protagonistes et public. Les cassettes sont également vendues ou louées aux particuliers et aux structures qui désirent les projeter. Chaque année, Vidéorème participe à des festivals de film documentaire en France et à l'étranger, et Ð ce n'est pas un hasard – a déjà reçu une dizaine de prix. Certains des films ont pu être vendus à Arte et France 3, mais ce mode de diffusion est plutôt rare et peu rémunérateur.

Par la force des choses, le collectif a dû s'occuper de la diffusion de ses films, qui pour la majorité ne risquent pas de passer sur les chaînes classiques. Un peu trop engagé, pas assez glamour peut-être ? C'est pourquoi Zalea TV représente enfin une possibilité de collaboration et une ouverture pour une diffusion moins confidentielle parce que nationale.

Par Clarisse Vidgrain et Fanny Bohuon.

Vidéorème
64, boulevard de Strasbourg
59100 Roubaix
Tél/Fax : 03 20 45 01 75

D'autres associations audiovisuelles en France : Primitivi à Marseille, Télé Bocal et Ondes Sans Frontières à Paris, Télé Pangée à Montpellier, Haro TV à BesançonÉ plus d'infos sur www.medialibre.org

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