Une télé locale : Sans Canal Fixe

Miko, Ola, Bordeaux Chesnel, Force Ouvrière, Cofidis, Festina... un défilé de voitures publicitaires qui lancent des casquettes, des pots de rillettes, des tracts à une foule amassée sur le bas côté et d'un seul coup... des bicyclettes qui passent à toute blinde, une voiture qui annonce "fin de course" et les gens qui se dispersent. 20 secondes de vélo, un des sujets de Sans Canal Fixe, donne le ton des émissions proposées par la télévision libre tourangelle ; une vision décalée de l'événement (en l'occurrence le Tour de France), pas d'explication off, donc la liberté pour le téléspectateur d'interpréter à sa guise ce qu'il voit.

Cette télévision associative locale s'est mise en place fin 1998. A l'époque, un collectif de réalisateurs, de techniciens et de journalistes se constitue pour réagir contre un projet de télévision privée, explicitement piloté par la droite, proposant une programmation type dépliant touristique : les vignes, l'artisanat régional, et des programmes météo à gogo. Leur premier tournage suit au jour le jour la mobilisation du comité de parrainage des sans papiers de Tours, sujet éminemment plus polémique que les vendanges, et depuis lors, les tournages s'enchaînent.

L'existence de SCF en tant qu'association date de février 1999, avec comme objet déclaré de "promouvoir la réflexion sur les médias de proximité, notamment par la réalisation et la diffusion de reportages." Ses instigateurs refusent que cette télévision soit "au service d'un groupe politique particulier" et la définissent d'abord comme "un accompagnement du mouvement social, et surtout comme un laboratoire d'écriture audiovisuelle."

Leur idée de la télévision : "une télévision qui entretient un rapport différent à "l'événement", avec une programmation non dépendante de l'actualité, mais aussi à la forme, avec la disparition du commentaire sur les reportages. L'idée est "d'assumer la subjectivité, contrairement à la télévision classique qui veut faire croire à l'objectivité." Ils travaillent sur la forme, en utilisant "la grammaire cinématographique", pour que les gens réagissent et "comprennent la subjectivité de ce qui leur est proposé, et se fassent une idée par eux-mêmes."

Les moyens sont plutôt modestes ; la télé fonctionne grâce aux cotisations des adhérents et au système de "télé brouette", c'est-à-dire que les lieux (bars, centres sociaux et même une chapelle) qui veulent diffuser une cassette des programmes de SCF paient 500 francs pour que l'équipe vienne faire une diffusion en amenant plusieurs téléviseurs câblés à un magnétoscope, avant de discuter avec les gens après la diffusion. Enfin, l'association reçoit une aide – on pourrait parler d'obole – de 5 000 francs par an de la part de la ville. C'est le système  D qui prévaut : prêt de matériel, dépenses payées de la poche des membres actifs...

La diffusion se fait donc soit par cassettes soit sur Internet, sur teleweb. SCF prévoit également un nouveau mode de diffusion pour la rentrée, un système d'emprunt de cassettes par des particuliers qui pourront regarder les programmes chez eux. Les émissions pourront aussi être diffusées sur Zalea TV. Mais, pour l'équipe de SCF, l'objectif reste également de continuer à passer dans les bars, pour que la télévision garde un lien avec les gens qui la regardent, que s'établissent des rapports humains autour d'elle – qu'elle ait une véritable fonction sociale.

La nouvelle loi sur l'audiovisuel permet, en théorie, à SCF de postuler pour une attribution de canal hertzien local, mais les critères de sélection sont presque tous d'ordre financier, et sans fonds de soutien aux télévisions associatives... Il n'y a donc pour l'instant pas véritablement de place, même au niveau local, pour ce type de télévision à petit budget.

Par Fanny Bohuon.

Sans Canal Fixe
24, rue de Cygne
37000 Tours
Fax : 02 47 05 51 39
E-mail : scf@fr.st
Site Web : www.scf.fr.st

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