Les télévisions associatives réclament une diffusion immédiate en analogique

Le Monde MÉDIAS du 25 août 2000 - Par Guy Dutheil

HOURTIN (Gironde)
de notre envoyé spécial

LES TÉLÉVISIONS ASSOCIATIVES et locales ne sont pas au bout de leur chemin de croix ! Quelques-unes d'entre elles ont saisi, mercredi 23 août, le cadre de l'Université d'été de la communication pour revendiquer une diffusion hertzienne immédiate. Comme le permet désormais la nouvelle loi audiovisuelle. La plus en pointe est Zalea TV. Cette chaîne associative, présidée par Michel Fiszbin, un des pionniers des radios et télévisions libres, telles Carbone 14 et Antène 1, vient de se voir refuser, par le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), une autorisation temporaire de diffusion hertzienne sur l'Ile-de-France. Pour motiver son refus, le CSA, qui a pourtant conventionné Zalea TV, le 25 juillet, pour une reprise sur le câble, a souligné qu'un programme déjà proposé sur les réseaux câblés ne pouvait être aussi retransmis en hertzien.

RIEN N'EST DÉCIDÉ
Pas découragée, "Zalea TV continuera son combat" pour obtenir une diffusion hertzienne analogique. M. Fiszbin invite le CSA "à se servir de la loi pour accélérer l'émergence des chaînes associatives et locales plutôt que d'entraver sournoisement leur lancement". L'autorité de régulation ne semble pas prête à suivre ce conseil. Gérald Ganascia, directeur de la communication et des études du CSA, affirme : "La priorité, c'est le numérique hertzien, la diffusion analogique est secondaire." Pour le CSA –qui se hâte lentement "sur ce dossier à part entière qu'est Paris et Ile-de-France" –, la prochaine étape est de lancer "en septembre-octobre, une phase d'étude pour l'exploitation d'une septième fréquence à Paris".
Rien n'est encore décidé. Le CSA n'a pas encore choisi de réserver ce canal aux chaînes du tiers secteur. Pourtant, plusieurs membres, notamment Philippe Labarde, seraient favorables à la reprise de chaînes associatives ou locales. De même, le CSA doit encore déterminer si ce septième réseau sera analogique ou numérique. En préférant l'analogique, l'autorité de régulation court le risque de se voir accuser de torpiller le développement futur numérique hertzien en favorisant la multiplication de l'offre de programmes analogiques. Un argument déjà employé, au milieu des années 80, quand les naissances de Canal+, Art, la Cinq et M6 avaient amoindri l'intérêt des réseaux câblés.

En voulant "donner toutes ses chances au numérique hertzien", le CSA est loin de combler le retard de la France en matière de télévisions locales face à certains de ses voisins européens. Ainsi, l'Italie, l'Espagne ou la Turquie comptent plusieurs centaines de chaînes locales.
Outre l'avenir particulier de Zalea TV, M. Fiszbin réclame que "le gouvernement prenne position pour soutenir la naissance de chaînes associatives". Le porte-parole de la Coordination permanente des médias libres (CPML) souhaite "la création d'un fonds de soutien" comme il en existe un pour les radios associatives. Parallèlement aux 100 millions de francs versés chaque année pour ces radios, il exige un minimum de 500 millions de francs par an pour les télévisions du tiers secteur. Selon lui, cette taxe parafiscale pourrait être prélevée sur le chiffre d'affaires des opérateurs de téléphonie mobile qui utilisent le spectre hertzien pour leurs activités commerciales. De plus, il réclame "que le gouvernement, mais aussi les acteurs industriels –opérateurs du câble et du satellite – prennent en charge la retransmission de ces télévisions sous la forme d'un must carry (obligation de diffusion)".
Ce n'est pas tout à fait le combat de Télé Bocal, chaîne locale parisienne dont l'autorisation temporaire de diffusion en analogique vient d'être reconduite pour trois mois. Richard Sovied, un des responsables de la chaîne, "n'est pas intéressé pour l'instant par le câble et le satellite". La crainte de Télé Bocal est que nombre des chaînes associatives qui pourraient être autorisées par le CSA connaissent le sort de beaucoup de radios associatives qui ont été progressivement rachetées par de grands groupes. En revanche, Télé Bocal milite aussi pour la création d'un fonds de soutien. L'autre cheval de bataille de M. Sovied est la création de chaînes de libre accès "comme il en existe partout en Europe". Pour y parvenir, il souhaite que "la responsabilité d'un programme de télévision soit déplacée du diffuseur au réalisateur".

Guy Dutheil


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